Si Johnny Deep peut être considéré comme un acteur exceptionnel, il ne fait pas le poids à côté de Juliette Binoche et n'arrive pas à donner à son personnage toute la force qu'il devrait posséder. Il fait de Roux, un homme mièvre, presque fade, qui ne correspond en rien à ce que l'on pourrait attendre de lui. L'histoire de Roux et Vianne semble presque anecdotique ici, alors qu'en fait, il s'avère qu'elle est très importante dans la quête de Vianne. Le personnage de Johnny Deep manque cruellement de personnalité, et confronté aux autres personnages du film, on se demande presque ce qu'il fait là... Cependant, on peut considérer que Chocolat est un film totalement réussi. L'humour côtoie le dramatique avec une alternance quasi parfaite. On rit des bons mots des personnages, on les encourage à se transformer, et on pris pour que Vianne soit enfin acceptée de tous. De plus le casting s'avère convaincant, et chaque acteur -hormis Johnny Deep- donne une réelle substance à celui qu'il incarne. Judi Dench, actrice confirmée s'il en est, est parfaite dans le rôle d'Armande, vieille femme rebelle et anticonformiste qui prend Vianne sous son aile... Et les deux enfants du film, Leslie Holleran et Aurélien Parent Koenig ont sans doute une grande carrière devant eux.

Chocolat a été plébiscité par le public américain et ce n'est que justice, par contre mieux vaut se rendre dans les salles l'estomac bien rempli, tant les images de friandises envahissent sans cesse l'écran. A moins, comme les acteurs lors du tournage, ne vouloir terminer avec une bonne indigestion en se ruant dans la première chocolaterie venue, une fois la projection terminée! Si la magie de Vianne a su agir sur vous aussi....
LE CHOCOLAT se déroule dans un village de conte de fée où le mode de vie des habitants a été établi il y a longtemps, bien avant leur naissance... Pour capter l'essence de ce petit village de Lansquenet, l'équipe a voulu créer un endroit qui semble être " magiquement réel " - un village comme ceux des contes, mais qui existe pour de bon. Après avoir mené des recherches poussées en Europe, le chef décorateur, David Gropman, a découvert la ville médiévale de Flavigny. Située près de Dijon, en Bourgogne, Flavigny a été fondée au Xème siècle. Perché au sommet d'une colline dont les ruisseaux dévalent les pentes, Flavigny a un point commun avec Lasquenet : on y fabrique de célèbres bonbons à l'anis. L'équipe de décoration a temporairement rénové la place principale du village, et la production et les acteurs du film ont invité les habitants à une fête durant laquelle ils ont pu se promener à leur aise dans le décor " revisité " de leur ville.
Certaines scènes ont été tournées dans l'ouest de l'Angleterre. plusieurs décors ont été utilisés, notamment Bruton pour la ferme d'Armande, le manoir de Brympton d'Eversy pour la maison du comte de Reynaud et Fonthill Bishop pour les scènes de la rivière. Le reste des prises de vues a été réalisé aux studios de Shepperton, à Twickenham, en Angleterre, où la place du village de Flavigny a été reconstruite et où ont été tournés la majorité des intérieurs - la boutique de chocolat, la cuisine de la boutique et l'appartement de Vianne. David Gropman a fait une sélection des façades des maisons de Flavigny et les a copiées en Angleterre.

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"Naïveté scélérate" de Marie-Noëlle Tranchant

C'est, paraît-il, une fable sur la tolérance. Avec ces deux mots fourre-tout, on s'autorise toutes les facilités: la fable dispense de la justesse, puisqu'on pourra toujours prétendre qu'on est dans le domaine de la fantaisie; et la tolérance dispense de l'intelligence: il suffit de la prêcher pour se sentir un esprit éclairé.

Armé de fausse candeur et de vrais poncifs, Lasse Hallström s'aventure donc au pays de la fable. Dans un petit village de France endormi sur ses préjugés et son obscurantisme millénaire, arrive une étrangère (Juliette Binoche) parée de toutes les qualités qui manquent aux habitants de Lansquenet (c'est le nom du village!) : elle est sensuelle, généreuse, indépendante, athée. Elle vient donner une leçon à ces pauvres attardés. Elle commence par ouvrir une boutique de chocolat pendant le carême, et se fait un ennemi du maire (Alfred Molina), petit hobereau tyrannique et aigri qui annonce que ses ancêtres ont cassé du huguenot, donc qu'il ne va pas se laisser intimider par une insolente. Naturellement, après une suite de péripéties plus bêtes les unes que les autres (dont l'arrivée de Johnny Depp en gitan), «Monsieur le comte», comme on dit ridiculement à longueur de film, sera converti avec tout le village aux bienfaits du chocolat, emblème de gourmandise, de convivialité et d'ouverture d'esprit.

Au pays de La Fontaine, il est permis d'attendre d'une fable un peu moins de niaiserie bien-pensante, un peu plus d'acuité et de finesse. Tout sonne faux dans ce village qui n'a même pas l'ingénuité du carton-pâte: ce n'est pas un lieu rêvé, mais un lieu fabriqué pour la démonstration. Il est habité par des pantins caricaturaux qui ne sont ni des personnages vivants, ni des allégories pertinentes. Le réalisateur essaie maladroitement de leur donner un peu d'épaisseur psychologique (le maire a été plaqué par sa femme, ce qui le rend humain!) et retombe aussitôt dans les clichés. Il essaie tout aussi vainement de donner un air de fraîcheur innocente à cette fable roublarde qui, sous couleur de tolérance, ne cesse de juger les uns et les autres, avec une mauvaise foi sucrée.

Parlant d'un écrivain à la mode, aujourd'hui complètement oublié, Baudelaire avait stigmatisé sa «naïveté scélérate». C'est exactement l'expression qui convient à ce Chocolat. A part le visage toujours radieux de Juliette Binoche (mais on la croyait exigeante sur les scénarios), les seuls plans réussis du film sont les gros plans, très appétissants, de chocolat fondant, onctueux, irrésistible! Un bon chocolatier fera beaucoup mieux l'affaire